Jeudi 7

Autant j’étais content d’avoir vu Velankanni, autant j’étais content d’en partir. Il y avait quelque chose de schizophrénique dans cette ville, entre l’ambiance limite transcendantale des sanctuaires et le côté sale et miséreux, sans compter les boutiques kitsch plutôt déplacées, qui l’entoure. Et je sentais bien que cela me mettais mal à l’aise …

Mais c’est en arrivant à Thiruvarur que j’ai compris à quel point ce mélange des extrêmes n’était pas bon pour moi. En effet, dès que je me suis posé dans ma chambre d’hôtel, j’ai commencé à me sentir mieux, posé, au calme, loin de cette « agitation » et de ces changements d’ambiance aux limites (et j’ai pu dormir quelques heures d’un sommeil apaisé, ce qui n’avait pas vraiment été le cas durant ces 2 jours là bas).

J’ai alors lu un article que j’avais laissé en suspend dans mon navigateur et qui parle de cette ville et de son temple (en anglais, plus intéressant si on a quelques bases sur l’hindouisme : lien ). Il semblerait que ce lieu de culte ait au moins 1400 ans, et probablement plus de 2000. C’est un endroit qui serait lié à l’énergie du 1er chakra, le chakra Racine, lié à l’élément terre, et qui permet justement d’avoir les pieds sur terre, ainsi que d’être en harmonie avec ses peurs. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai choisi de visiter ce lieu (j’ai une certaine tendance à planer) … mais le temple est plus grand que ça et il y aurait une multitude de divers sanctuaires éparpillés dans sa grande enceinte.

Comme on le vois sur les photos, l’enceinte elle-même est constituée de murs d’au moins 5 ou 6 mètres de haut, afin d’être isolé du tumulte extérieur. Aussi, il y a 4 portes principales, une sur chaque point cardinal, qui sont impressionnantes. Finalement, une de ces portes fait face à une sorte de lac artificiel, un grand rectangle d’au moins 100m de côté avec un petit temple trônant sur une île en son centre. Visiblement c’est un lieu pour sa baigner et/ou se purifier.

Il faut aussi noter que l’ambiance est très différente de Velankanni à plusieurs niveaux. Déjà, la ville a l’air propre, ordonnée, avec quelques belles maisons dans les ruelles d’habitation que j’ai parcouru. Il n’y a pas des masses de monde non plus. Certes, on est en inde donc il y a du monde, mais comparé aux autres villes visitées jusque là, c’est plutôt tranquille ! Et le temple n’a pas l’air visité par des hordes non plus, je m’attendait à autre chose. J’ai l’impression que seul les locaux, et sans doute quelques pèlerins de passage comme moi, y vont.

J’en ai fait le tour 2 fois, de jour et de nuit, pour me prendre la mesure, et demain matin j’entre.

Aussi, vu que j’étais un peu malade hier soir (j’ai peut-être fait un excès de plats pimentés ?), j’ai ressenti le besoin impérieux de manger de la viande. Le poulet Tandoori que j’ai dévoré était simplement exceptionnel !!! Du coup mon végétarisme de circonstance en prend un coup, mais d’un autre côté c’est ce dont j’avais visiblement besoin pour me remettre de Velankanni.

Vendredi 8

Ce matin j’ai donc pris le temps de pénétrer dans l’enceinte du temple. Et en fait d’enceinte, il y a pas moins de 3 enceintes qui se suivent, toutes avec ces murs de 5 ou 6 mètres. L’intérieur de la première enceinte m’a surpris, ce que j’y voyais paraissait globalement laissé à l’abandon. Comme on le vois sur les photos, ce sont surtout de grandes allées vides et des colonnes dressées qui semblent avoir perdues les bâtiments qu’elles soutenaient.

Après avoir fait le tour de la première enceinte, je suis entré dans la seconde. Ici, de très nombreux mini-sanctuaires se succèdent, chacun contenant un Lingam. Il doit y en avoir pas loin d’une vingtaine, je crois que je n’en avais jamais vu une telle concentration. C’était aussi un endroit où je pouvais encore prendre des photos. Par contre, en entrant dans la dernière enceinte, plus de photos.

Et comme j’ai pu m’en rendre compte en sortant, plus on s’enfonce au coeur du temple, plus l’ambiance change. Un peu comme dans une église où il règne une atmosphère un peu particulière, ici l’ambiance était de plus en plus présente, intense. Et c’est effectivement en sortant de là et en ayant la sensation de me sentir bien plus léger que j’ai pu faire la différence, d’autant plus que j’ai fait un ou deux allez/retours entre les enceintes où j’ai pu mieux mesurer cet aspect.

Ainsi, l’intérieur de la 3ème enceinte permet de voir, entre autres choses, une très ancienne représentation de Ganesh et un gros Lingam qui dégage une forte présence. Le fait qu’il y ait peu de monde permet de prendre le temps de s’imprégner du lieux, contrairement aux grands temples où la nécessité de gérer la foule conduit à des temps de contemplation particulièrement courts.

Quand je suis sorti, il était environ 11h avec pas grand chose de prévu. J’ai donc commencé à arpenter les rues … et il y a d’autres petits temples un peu partout. En allant de petites chapelles avec un Ganesh dedans, à des espaces plus grands dédiés à Murugan (un autre fils de Shiva) ou Durgah. J’ai d’ailleurs pris un moment pour aller saluer Durgah, apportant des offrandes comme le faisait plusieurs fidèles (surtout des femmes), mais je me suis planté, il fallait rester pour récupérer ces offrandes une fois traitées par les brahmanes ! Or je suis parti avant, leur laissant noix de coco, bananes et autres fleurs pour leur utilisation à loisir …

Finalement, cette visite de la ville, outre la multitude de petit temples, m’a vraiment confirmé le caractère « rangé » de cette bourgade. Errer dans ces quartiers d’habitation calmes et colorés était vraiment plaisant. Aussi, la plupart des habitations ont généralement 2 talismans de protection : une tête de démon pour faire peur aux autres démons et une sorte de mandala fleuri au sol (cf. photos).

J’avais prévu de rester un jour de plus, mais il n’y a pas grand chose à faire de plus, du coup demain direction Thanjavur.

Quand j’y pense, je commence aussi à mesurer le climat. La température dans l’après-midi commence à être difficile à supporter et je préfère finalement profiter de la fraîcheur de ma chambre d’hôtel. Les rues sont aussi un peu plus vides dans ces heures là, alors que le matin ou le soir de nombreux badauds arpentent les rues.

J’ai aussi pu constater un peu mieux comment les habitants vivaient à travers les temples : apparemment, il y a un temps le matin pour visiter un ou plusieurs sanctuaires et y recevoir leurs bénédictions. Chacun suit le rite qui va bien, puis est alors prêt à vaquer à ses occupations, après un petit café ou thé. Les personnes qui ont des « décorations » sur la tête, souvent des bandes blanches pour les hommes, ou plutôt un point rouge pour les femmes, portent souvent la marque d’un des rituels qu’ils ont suivis (en général, mais il semble que les femmes s’en mette parfois comme du maquillage ??). C’est aussi pourquoi, je pense, les temples ouvrent dès 5h30 du matin. Il y a aussi une vie templière de soirée, probablement pour remercier les dieux de la journée qui s’est bien passée ? A ce sujet j’y suis retourné le 2ème soir et j’ai discuté avec un indien qui venait honorer une représentation d’un (Du ?) maître yogi pour l’aider pour un examen important pour ses études.

Samedi 9

Je me suis levé à 5h15 ce matin pour visiter le temple dès son ouverture. J’ai dû entrer vers 5h45 … puis vers 6h00, ils ont commencés à ouvrir les portes de la dernière enceinte. S’en est suivi une scène ancienne qui est visiblement répétée tous les jours. Une vache sacrée a été amenée juste devant la porte. Elle a été bénie de diverses façons, en particulier en la couvrant de fleurs fraîches. Visiblement habituée, elle s’est laissée faire stoïquement … ensuite, les quelques fidèles présents ont suivis les prêtres pour aller chercher des reliques (je n’ai pas bien vu de quoi il s’agissait) et les mettre dans une sorte de coffre qu’ils ont ensuite porté jusqu’à l’intérieur du temple pour les en sortir et les mettre sur l’autel dédié. Je suppose qu’elles font le chemin inverse le soir.

A cette heure très matinale, quelques personnes sont aussi passées pour saluer quelques unes des diverses figures présentes à l’intérieur. Je pensais être le seul imbécile à se promener avec un petit sac à dos, mais un étudiant qui devait passer avant d’aller en cours m’a rassuré sur ce point …

Voilà, la suite c’est Thanjavur (où je viens juste d’arriver).